LUMIERE
« Ne pleures pas p’tit gars, je dois partir maintenant ! »
Il observait ce petit bonhomme qui le regardait avec tristesse. Il n’était pas son fils, mais c’était tout comme.
C’est au cours d’une de ces « mise en scène pour le grand départ » qu’il l’avait croisé recroquevillé sur lui-même, dans un recoin où nul ne lui portait attention. Il avait finalement trouvé une échappatoire à ce génocide qu’on faisait subir à son peuple …… survivre par les yeux de ce petit bonhomme.
« J’aimerai tellement venir avec toi tu sais, j’ai beaucoup peur quand je suis tout seul, et après je vais beaucoup pleuré.
- Tu sais bien qu’ils ne font partir que « les mâles adultes » comme ils disent, je ne peux pas t’emmener avec moi.
- S’il te plait, je serais sage tu sais.
Cette conversation lui tordait les entrailles, il ne pouvait décemment pas lui dire que la prochaine simulation serait certainement la dernière. Il l’avait compris car d’habitude, ils les faisaient rentrer dans cette fosse avec leurs vêtements, enchevêtrés les uns sur les autres. Et quand l’humiliation de la situation apportait assez de satisfaction à leurs geôliers, ils les faisaient ressortir en file indienne. Cette fois-ci, c’était différent, on leur avait sommé de se dévêtir avant de descendre.
« Ecoutes fiston, écoute moi bien », le petit bonhomme se tenait là, dressé fièrement devant lui, écoutant les derniers conseils de celui qui lui était si cher, « Caches-toi, ne sors que quand tu n’as pas le choix, et surtout, évites cette maudite fosse, elle ne nous apporte que le malheur d’un grand départ sans jamais de retour ».
Il terminait tout juste sa phase que déjà il se faisait emporter par le flot humain qui avançait vers cette sordide destinée.
Il tenta de crier un dernier « Adieu » à ce fragile petit être, mais un de ses gardiens le rappela vite à l’ordre : « Hé, hé, hé, tu lui as dis à ton fiston que c’est le prochain sur la liste ? »
La colère monta en lui, mais comme les autres fois, il ne dit rien, que pouvait-il y faire, certains peuples naissent opprimés.
Son maton rajouta : »
- Je te demanderai bien de me raconter ce qu’il y a dans la lumière au bout du tunnel, mais j’ai bien peur que tu ne puisses jamais m’en reparler. »
Ce fût les derniers mots qu’il entendît de sa part.
Ils étaient tous nus comme des vers, entassés sans état d’âmes dans cette fosse. Dans la pénombre, il entendait chuchoter les craintes des autres, qui commençaient déjà à être écrasés à ne plus pouvoir respirer. Il perdît peu à peu sa lucidité, il avait du mal à analyser combien ils pouvaient être là- dedans…… Des centaines….. Des milliers….. Peut-être plus !
La pression devenait de plus en plus insupportable, lorsqu’elle cessa complètement. Il eu soudain la sensation d’être attiré à toute vitesse dans un long tunnel sombre. Il ne discernait qu’un petit point lumineux au loin, qui grandissait au fur et à mesure qu’il avançait. La lumière grandissante clignotait étrangement à intervalles réguliers. Il regarda autour de lui et s’aperçut qu’il n’était pas seul à remonter ce tunnel interminable. Tout près de lui, accompagnant son ascension, un de ses semblables lui dit avec un sourire d’encouragement :
« Tu te souviens hein ? Le premier qui rentre dans l’ovule a gagné !!! ».